Le thé 茶 Chá représente en Chine une véritable institution sociale et culinaire, riche d'une histoire de plusieurs millénaires.
La légende raconte que Shennóng 神农 héros civilisateur de la mythologie chinoise, découvre accidentellement le thé en faisant bouillir de l'eau assis sous un theier dont les feuilles tombent accidentellement dans sa boisson.
Histoire
Les feuilles de théier sauvage ont sans doute été utilisées sous forme médicinale dès l'époque préhistorique. La culture du théier serait quant à elle apparût à la fin de l'Antiquité.
Des preuves archéologiques ont été trouvées indiquant que le thé était utilisé comme médicament sous La dynastie Han (206 av. J.-C.206 -220 ap. J.-C.).
Mais c'est seulement sous la dynastie Tang (618-907 ) que le thé devient une boisson très appréciée, d'abord dans les cercles de la cour puis par les moines bouddhistes et enfin dans toutes les classes sociales de la population.
A cette époque le thé se présente généralement sous forme de briques compactes, il est réduit en poudre fine et infusé dans l'eau bouillante avec d'autres épices et aliments (gingembre, oignons, zestes d’orange, aromates, herbes, menthe …). Il est servi dans des bols en bois.
Le classique du thé chájīng 茶经 écrit par Lù Yǔ vers 870 est le premier ouvrage au monde traitant de la culture du thé .
Les dix chapitres du traité
Chapitre 1. Origines/ l'origine mythologique du thé . Il contient également une étude horticole de la plante et une recherche étymologique.
Chapitre 2. Outils du thé/ Les quinze outils pour récolter, presser, sécher et conserver les feuilles et gâteaux de thé.
Chapitre 3. Fabrication/ procédé de production du gâteau de thé (thé compressé).
Chapitre 4. Matériel/ les vingt-huit objets employés pour la fermentation et la dégustation du thé.
Chapitre 5. Fermentation/ les étapes de la préparation du thé.
Chapitre 6. Boire/ les différentes propriétés du thé, l'histoire de sa consommation et les différents types connus en Chine en ce temps-là.
Chapitre 7. Anecdotes/ à propos du thé, de Shennong à la dynastie Tang.
Chapitre 8. Lieux/ les huit régions productrices de thé en Chine.
Chapitre 9. Omissions/ les procédures qui peuvent être omises et les conditions dans lesquelles elles peuvent l'être.
Chapitre 10. Résumé
Le théier est lent à produire. Il faut attendre trois à quatre ans avant que l’arbuste, taillé en boule, atteigne sa taille idéale d’un mètre et demi. il est alors seulement possible de récolter ses premières feuilles. La cueillette est effectuée à la main par les femmes.
Le thé de meilleure qualité est réservé à l'empereur, puis aux membres de la famille impériale et enfin aux fonctionnaires.
Sous la dynastie Tang, trente jours annuels étaient ainsi consacrés à la cueillette du thé destiné au tribut impérial.
La culture et consommation du thé répandue à travers toute la Chine devient un véritable marqueur de civilisation. Déguster du thé s’apparente de plus en plus à un art et une philosophie de vie teintée de spiritualité.
La Cérémonie de cueillette du thé à la troisième lune
Le rituel se déroule tous les ans, les fonctionnaires du thé sont alors chargés de définir un jour favorable pour organiser la cérémonie où l'on fait des offrandes aux génies de la terre et des céréales dans un temple de la montagne Ming Ling.
Durant la dynastie Ming (1368-1644) les briques de thé sont remplacées par du thé en vrac. Ce changement facilite la vie des agriculteurs, car la méthode traditionnelle de création de briques de thé exigeait beaucoup de main-d'œuvre.
Le raffinement de l’ensemble du processus d’infusion du thé à partir de feuilles entières nécessite un nouveau type de récipient, la théière.
La fabrication des fameuses théières de Yixing débute (vers 1500). La qualité de ces théières en terre est de favoriser un tanin au fil des infusions conservant ainsi les arômes et les saveurs des thés.
Ces théières sont destinées à un usage individuel, chacune d’elle étant réservée à la préparation d’un type de thé particulier.
Un art du service et de la porcelaine va parallèlement voir le jour afin de préparer et déguster le thé dans les meilleures conditions.
Les maisons de thé 茶馆 Cháguǎn
Les maisons de thé• créees sous la dynastie Tang (618 à 907) sont réservées aux classes privilégiées, c'est un lieu où on reçoit ses invités pour parler de ses affaires publiques et privées.
Ce n’est qu’à partir de la dynastie Qing (1644 - 1912) que les maisons de thé deviennent accessibles à tous et se transforment en lieux de divertissement.
La Chine commençe progressivement le commerce du thé avec la Corée, le Japon, la Russie et avec les pays arabes.
Introduction du thé chinois au Japon
Le thé est introduit au Japon à l'époque de Nara (710-794).
En 804, les moines bouddhistes Kūkai et
Saichō partent étudier la religion en Chine. Un des deux moines rapporte à son retour au Japon, des graines de théier.
En 815, un moine bouddhiste sert du thé à l'empereur Saga.
Suite à sa dégustation, l'empereur ordonne la création de cinq plantations de thé près de la capitale.
Amateur de poésie chinoise, il rédige des poèmes dont plusieurs mentionnent la consommation de thé.
Bien que quelques jardins de thé aient été plantés dans la préfecture de Saga, l'approvisionnement du thé au japon se fera encore par la Chine pendant plusieurs siècles.
Introduction du thé chinois en Europe
Entre le XVI e siècle et le XIX e siècle de nombreux européens, missionnaires jésuites, botanistes ou marchands partent à la découverte de l’Asie et ramènent toutes sortes de récits de voyages.
Le thé est mentionné la premiere fois en 1555 dans le "recueil de traités géographiques" redigé par le géographe vénitien Giovanni Battista Ramusio qui rapporte l'histoire d'un marchand arabe signalant l'existence d'une plante médicinale en Chine nommée Chiai-Cathay. A noter que ce "recueil de traités géographiques" est une compilation des récits géographiques de divers auteurs dont Marco Polo.
Il faudra attendre néanmmoins le développement des routes maritimes et commerciales entre l’Orient et l’Occident au XVII e siècle pour que l’Europe découvre le thé.
L'importation du thé en Europe
L’introduction du thé en Europe par les Hollandais.
La première cargaison de thé chinois connue et enregistrée dans un port occidental arrive en 1606 à Amsterdam, grâce à la Compagnie des Indes Orientales.
La Compagnie des Indes orientales missionnera en 1842 le botaniste et aventurier écossais Robert Fortune, pour trouver les secrets de la fabrication du thé à la Chine.
La Compagnie néerlandaise des Indes orientales, connue sous l’acronyme « VOC » fondée en 1602 à Amsterdam et dissoute pour corruption en 1799 est la plus influente des compagnies européennes exploitant les richesses venues d’Asie. Elle est à l'origine du modèle de l'entreprise multinationale .
La première mention de la consommation de thé apparaît en Hollande en 1637. La boisson devient à la mode en Europe pour ses vertus thérapeutiques, médecins, hommes de cour et personnages illustres comme Racine ou Mme de Sévigné, s’intéressent à ce nouveau breuvage. Mais le thé reste une boisson de luxe notamment en Europe centrale et dans le pourtour Méditerranéen où le café venant d’Afrique à moindre frais conserve la préférence.
Il n'en est pas de même pour la Grande-Bretagne où le thé introduit vers 1600 va connait un succès définitif .
Ainsi au milieu du XVIIIe siècle, le thé malgré son prix élevé est devenu la principale boisson de toutes les classes sociales.
Son commerce devient un enjeu financier de premier plan.
La forte demande britannique créé un déséquilibre commercial avec la Chine. Pour y remédier, la Grande-Bretagne exporte de l'opium en grande quantité mais la Chine désire en interdire le commerce en raison des ravages occasionnés sur la population chinoise.
Au XIXe siècle, la Grande-Bretagne va alors déclencher les guerres de l'opium contre la Chine. Ces conflits motivés par des raisons commerciales ont pour objectif d'affaiblir la Chine et de forcer son ouverture aux puissances étrangères.
Les guerres de l’opium commencées en 1839 et 1856 se termineront par la défaite de l'armée chinoise en 1860 contre l'armée britannique alliée à celles des USA et de la France, obligeant la Chine à concéder le territoire de Hong Kong pour 99 ans à la Grande-Bretagne.
Les informations, les plantes et les graines récoltées par Robert Fortune missionné par la Compagnie des Indes orientales seront alors utilisées pour lancer la production de thé à grande échelle en Inde. La production de thé indienne va rapidement dépasséé celle de la Chine. L'industrie chinoise du thé entre alors en déclin et ce n'est que récemment que la Chine a retrouvé son statut de premier exportateur de thé au monde.
En savoir plus
•Les maisons de thé de la région du Sichuan,
C'est la région chinoise par excellence des maisons de thé car une des plus anciennes provinces productrice. Lesmaisosn de thé possèdent dansle style traditionnel du Sichuan, une théière en cuivre rouge, un plateau en étain pour ranger les tasses et les bols en porcelaine munis d’un couvercle. L’attention se porte sur l’accueil des clients, l’aspect de la maison, le service à thé, la finesse gustative et l’art d’arranger la salle.
• La Maison de thé est une pièce de théâtre de Lao She publiée pour la première fois en juillet 1957. Elle met en scène plus de 60 personnages qui se rencontrent dans une maison de thé. Elle se déroule en trois actes sur trois époques 1898, les années 1920 et à la fin de la Deuxième Guerre Mondiale). Seul le lieu ne change pas : une maison de thé authentique et célèbre de Pékin.
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